Miss Peregrine et les enfants particuliers 2 - Hollow City by Ransom Riggs

Auteur:Ransom Riggs [Riggs, Ransom]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Roman
Éditeur: Bayard jeunesse
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00

CHAPITRE HUIT

E

mma m’a poussé du coude.

— Alors ?

— Donne-moi encore une minute.

Bronwyn avait posé sa malle, et je m’étais perché dessus pour scruter la mer de visages qui déferlait sur le quai. Il y avait là d’innombrables enfants ; ils se déplaçaient comme des amibes sous un microscope, avant de monter dans des trains noirs, qui les avalaient et repartaient en sifflant.

L’impatience de mes amis était palpable. Ils me regardaient observer la foule, l’air tendu. Je devais les prévenir si j’apercevais, dans cette masse grouillante, des monstres résolus à nous tuer. Et j’étais censé le découvrir d’un simple regard, en me fiant à un vague malaise, un mal de ventre. Par le passé, j’avais souffert de violentes crampes d’estomac chaque fois qu’un Sépulcreux s’était trouvé dans les parages. Mais dans un espace aussi vaste, parmi ces milliers de voyageurs, ce signal risquait d’être imperceptible.

Un frisson, le plus minuscule des pincements…

— Les Estres savent-ils que nous venons ? a demandé Bronwyn à voix basse, de crainte d’être entendue par des gens normaux – ou pire, par un Estre.

On nous avait rapporté que ces derniers avaient des oreilles partout à Londres.

— Nous avons tué tous ceux qui auraient pu avoir eu vent de nos projets, a répondu Hugh avec fierté. Ou plus exactement, je les ai tués.

— Autrement dit, les autres mettront encore plus d’ardeur à nous chercher, a déclaré Millard. Et désormais, ils ne voudront plus seulement l’oiseau. Ils voudront se venger.

— Ne traînons pas ici, a dit Emma.

Elle m’a tapoté la jambe.

— Tu as bientôt fini ?

— Encore une minute.

À vrai dire, ce n’étaient pas les Estres qui m’inquiétaient le plus, mais les Creux. J’en avais tué deux à ce jour et, chaque fois, j’avais frôlé la mort. La chance – si c’était elle qui m’avait permis de rester en vie – allait forcément me faire défaut un jour. C’est pourquoi j’avais décidé de ne plus jamais me laisser surprendre. Je ferais tout pour sentir les monstres d’assez loin et les éviter. Fuir était moins glorieux que combattre, bien sûr. Mais la gloire ne m’intéressait pas. Je voulais juste ne pas mourir.

Ainsi, le véritable danger ne venait pas des silhouettes sur le quai ; il se cachait dans les ombres, l’obscurité et les recoins. C’était sur ces endroits que je fixais mon attention. J’avais une impression étrange, comme si je sortais de mon corps pour projeter à l’extérieur, à l’affût d’éventuels dangers. Quelques jours plus tôt, j’aurais encore été incapable d’agir ainsi. Cette capacité que j’avais à diriger mes sens, tels des projecteurs, était nouvelle pour moi.

— La voie est libre, ai-je annoncé en descendant de la malle. Pas de Sépulcreux en vue.

— Ça, j’aurais pu te le dire ! a pouffé Enoch. S’il y en avait eu, ils nous auraient dévorés à l’heure qu’il est !

Emma m’a pris à part.

— Il faut que tu sois plus rapide si on veut avoir une chance de se défendre.

Autant demander à quelqu’un qui vient d’apprendre à nager de disputer une épreuve olympique.

— Je fais de mon mieux, ai-je dit.

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